O ’Symetric LA BANALISATION DE L’EXPLOIT « TWINCAM » !

La petite société niçoise a remporté six grands Tours, dont 4 Tours de France. Sans débourser un centime en communication ou en sponsoring. Un exploit dont pourtant aucun grand media ne parle, et qui n’attire la curiosité d’aucun ministre du commerce, de l’industrie ou des sports. Retour sur un succès indiscutable et pourtant discuté : une exception française.

O'Symetric JL Talo
Jean Louis Talo entre ombre et lumière

Question. Quand une équipe anglo-saxonne multimillionnaire, dont la religion est la victoire, et l’unique objectif la rentabilité, promet une communication mondiale à son bailleur de fond (Sky)… Quand cette équipe achète des plateaux et les installe en lieu et place de ceux de
leur partenaire technique, leader mondial sur son secteur, doit-on considérer qu’elle fait un caprice ou qu’elle a décidé de s’équiper des meilleurs produits, quels qu’ils soient, d’où qu’ils viennent ? La réponse est évidente ! Encore plus lorsque l’on parle d’une équipe anglaise et d’un constructeur français !!!

O’Symetric a vingt ans. Jean-Louis Talo, son génial patron et créateur en a, lui, soixante-deux. Et si ce n’est pas encore dans la tête de tout le monde, il va bien falloir un jour que l’on comprenne que cet homme est de la trempe des Rolland Cattin (Time), Ernesto Colnago ou encore Yoshizo Shimano (le fils). Mais nous sommes en France, alors c’est plus dur, voire impossible d’atteindre la consécration méritée. Entre scepticisme et jalousie, rien n’est facile dans ce pays !

O'Symetric Plateaux nouvelle generation
Les plateaux de dernière génération progressent en poids et en finition.

L’Histoire de cet ingénieur français est folle. La voici. Jean-Louis Talo est né à Joeuf, petite ville de 10000 habitants de Meurthe-Et-Moselle (54), comme les Platini, père et fils, les célébrités de toujours de la bourgade. Mais c’est à Aix-en-Provence et à Nice que le jeune Jean-Louis va étudier les sciences, l’économie et même la philosophie. Curieux de tout, sportif, fondamentalement tourné vers le futur, il s’adonne aussi à la biomécanique et la physiologie de l’entraînement. Avec son bac technique en poche et son diplôme de génie mécanique, renforcé par sa double formation en biomécanique et physiologie de l’entraînement, donc, Jean-Louis est prêt. Biomécanique ? C’est la science de l’application des lois mécaniques aux problèmes de biologie, physiologie et médecine. En résumé, comment se servir aux mieux de ses muscles. Techniquement et sportivement parlant.

O'Symetric Harmonic
Les plateaux Harmonic ceux avec lesquels Wiggins a débuter l’épopée victorieuse d’O’Symetric

En 1995, lorsqu’avec Michel, son brillant ami de promo, lui aussi ingénieur, ils observent un plateau de vélo, par hasard, ils en concluent que c’est bien là la forme la plus basique pour un plateau de vélo mu par un cycliste. Et qu’il y a forcément mieux à faire : il a alors la révélation d’un plateau qui en offrirait un peu plus. Jean-Louis Talo est loin de se douter qu’il allait accoucher quelques années plus tard d’un exploit unique dans les annales du Tour de France, de la physiologie du sport et du sponsoring « équitable » : gagner six grands Tours dont quatre de France en révolutionnant le rendement d’un des composants de vélo et en révélant successivement deux pistards inconnus ou presque !

Bien peu de gens prennent suffisamment de recul pour analyser cet exploit majuscule. Encore plus dans le monde ultra « marketé » d’aujourd’hui où la communication a depuis longtemps remplacé la raison et la physique…

Pourtant, malgré les faits, le plateau O’Symetric peine encore à s’imposer. C’est en 2013 qu’à l’Acheteur nous avons vraiment découvert ce plateau. Et nous le testons. C’est immédiatement la révélation : il se passe bien quelque chose. C’est plus drôle, plus ludique, et indéniablement moins fatiguant. Le temps de m’habituer, rapidement, quelques kilomètres suffisent, à ces curieux plateaux qui tournent comme des patates, et je constate que tout est plus facile ! Encore plus en faux-plat. Plus tard, je rencontrerai Geoffroy Lequatre, ex-pro chez Radio Shack, et ancien co-équipier d’Armstrong, utilisateur de la première heure de l’O’Symetric, juste après Bobby Julich… dithyrambique (voir plus bas).

O'Symetric Froome
Froome O’Symetric

A titre personnel, deux points me chagrinent pourtant : la fluidité de mon dérailleur avant en a pris une claque, et ce curieux plateau, comme fabriqué à la hâte, n’est pas très beau ! En complément de ces deux points, O’Symetric va devoir se battre contre de nombreux autres : ils seront au nombre de cinq. La religion cycliste, le dopage, le sponsoring, la communication et… les magasins. A commencer par la religion cycliste.

La religion du vélo : des travers coupables et rétrogrades

Le vélo est un sport ultra conservateur. Pour des raisons probablement philosophiques mais aussi historiques, le vélo met un temps infini à évoluer. Un peu à l’image de la France et de l’Italie. Lorsque Francesco Moser s’est attaqué au record de l’heure avec son drôle de vélo à grande roue arrière, personne n’a compris ce qu’il se passait. Lorsque Maillard a lancé le moyeu Helicomatic, personne n’en a vraiment voulu. Lorsque Shimano est arrivé avec ses manettes indexées, on a crié au scandale, au crime de lèse-majesté. Aujourd’hui, il en est de même avec les freins à disques. C’est ainsi dans le vélo.

Il faut dire que les gens ont une bonne raison de se méfier des « innovations » : on leur raconte n’importe quoi depuis quarante ans ! Ce qui peut rendre suspicieux. Du coup, on a jeté le bébé avec l’eau du bain. Ca s’appelle le dogme. Et cela a fait des ravages depuis la nuit des temps.

O'Symetric Livres

O’Symetric s’est retrouvé confronté à cela. En gros, un vélo a deux roues de 700. Depuis toujours. Egalement un cadre en acier. Mais aussi des roues à rayons, une chaîne, un guidon et un double plateau. Et malheur à celui qui veut changer ça. Surtout si cela ne rapporte pas d’argent !

En termes de rendement, pour que l’on y croie, il faut que cela se voie. Ou que l’on comprenne. Et dans le vélo, on ne comprend qu’une chose : que les « pros », sur le Tour, roulent et gagnent avec le nouveau produit. Il sera alors adoubé par « la masse » et deviendra objet de désir. C’est pour cela que les constructeurs dépensent des fortunes pour s’offrir une équipe
World Tour. C’est aussi simple que cela.

O'Symetric GP Plateau

Un « pro », c’est un jeune homme, surdoué, brillant, âgé de 20 à 35 ans. On le paie pour gagner des courses et montrer le maillot. Mais, contrairement à ce qui est véhiculé, surtout pas pour donner son avis. Ca tombe bien, en général, il n’en a pas !

Et quand il en a un, cela n’intéresse personne. Surtout s’il est technique, car le plus souvent totalement erroné ! Mais parfois, certains se révèlent. Ce sera le cas de Geoffroy Lequatre, aujourd’hui patron et fondateur de la marque de vêtement cycliste G4 dimension.

O'Symetric Interieur petit plateau
Intérieur petit plateau

Ce qui intéresse, en revanche, et nuit profondément à l’innovation, entre autres, c’est le dopage. Le constat est simple : le dopage, selon Ricardo Ricco et quelques esprits bien informés, c’est un apport de 20% de performances en plus. C’est énorme.

Quelle « invention » technique peut s’imposer face à cette chimie ? Quelle qu’elle soit, son apport n’a jamais dépassé quelques watts. Pourtant, ils suffisent souvent à faire la différence et à gagner une course. O’Symetric s’est retrouvé confronté à ce marigot !

O'Symetric JL Talo Maillot Jaune
Avec Chris Froome, JL Talo dispose d’un coureur et un ami entièrement dévoué a la cause du plateau twincam.

Sponsoring moderne : le droit de nuire…

De son côté, le sponsoring a jeté son dévolu sur le cyclisme. Des millions de (télé)spectateurs, le monde à ses pieds, un coût au mille sans concurrent, et cette masse qui plaît tant à ceux qui sont là pour vendre. Une chasse gardée et gare à qui veut se mêler au festin ! Ici, il faut montrer patte blanche, entendez les millions. C’est d’ailleurs la règle du jeu un peu partout. Des places souvent gagnées à la régulière, au fil des années. Mais parfois, ça… déraille ! Et un type sort de son garage un drôle de plateau qui fait aller plus vite et/ou moins se fatiguer. Et puis, on ne sait comment, ce plateau se retrouve sur le vélo d’un Kenyan blanc. D’un petit coureur, qui devient un géant. Dopé ? Bien sûr, sinon comment expliquer une telle métamorphose ? Sûrement pas par la science, la vraie : que Froome soit passé de 74 à 68 kg ? On s’en fout. Ou, peut-être, qu’il ait compris avant tout le monde que ce drôle de plateau allait l’aider à devenir le meilleur cycliste du monde ! Alors oui, ça nous fait un drôle d’asthmatique, quand même. Mais est-ce là tout. Pas sûr.

Et là, c’est branlebas de combat. Le partenaire, ça ne lui plaît pas bien, ce plateau. Mais l’autre est devenu trop fort. Il a inversé les rôles. C’est lui qui décide, maintenant. Et son plateau, il le garde… Quant aux autres, ceux des autres équipes qui ont testé l’O’Symetric, ils ont été séduits. Mais « ON » leur a dit non. Désolé. Ca manque de pépètes, derrière…

O'Symetric deventure

Les magasins : comment transformer une solution en problème !

Si le plateau Twincam de Jean-Louis Talo interroge, on s’attendait à ce que la majeure partie des magasins apporte une part de réponse. Cela n’a malheureusement pas été le cas. Plus compliqués à comprendre, plus compliqués à expliquer et plus complexes à régler, les plateaux O’Symetric n’ont jamais vraiment trouvé leur place dans nos magasins. C’est tout à fait dommage car, comme aime à le répéter Jean-Louis Talo, de guerre lasse : « Si mes plateaux ne permettent pas aux cyclistes d’aller plus vite ? Je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est qu’ils ne les empêchent pas d’aller aussi vite… »

Là encore, il semble que la tradition et la religion cycliste aient pesé de tout leur invisible poids sur les épaules de nos détaillants. Bien sûr, certains sont passés au-delà du poids de l’histoire cycliste mais bien peu, en vérité. Ils se reconnaîtront ou vous les reconnaîtrez. Mais devinez quoi ? Comme par hasard, Jean-Louis Talo vend beaucoup plus de ses extraordinaires plateaux en Angleterre, aux USA et en Australie qu’en France. Comment dire… ?!?

O'Symetric Julich Megeve 2005
Julich Megève 2005 Tour de France

Julich, Wiggins, Froome et O’Symetric : un invraisemblable concours de circonstances

Côté « pro », tout a commencé avec Bobby Julich, le coureur de la CSC, en 2004. Six ans plus tôt, Julich est un honnête coureur, il vit à Nice. Un beau jour, dans une boutique de décoration de la ville, Julich est légèrement fiévreux. Il discute nonchalamment avec la propriétaire des lieux et la discussion dérive sur un certain médecin qui officie dans les Hautes-Alpes, à 300 km de Nice. Apprenant la profession de Bobby, la dame vante les mérites de cet homme aux méthodes douces, qui privilégie les plantes, la manipulation et la logique à la chimie… avec la pointe de mystère qui émane de tous ces hommes-là. En 1998, on est en plein dans les années EPO. Bobby fait troisième du Tour. Il sait qu’il triche, lui aussi. Il cherche la solution pour gagner face à la chimie… Bobby est séduit par le discours de la dame en question. Sa curiosité est piquée. Après s’être renseigné, Il rendra visite au fameux « médecin ». Ces deux-là parleront de tout et de rien. Et si cela ne débouchera sur rien de particulier, médicalement parlant, au détour de la discussion, le médecin proposera à Bobby Julich d’essayer ces drôles de plateaux fabriqués par son copain ingénieur français, qui officie à Nice. Bobby rencontrera Jean-Louis Talo à l’intersaison.

O'Symetric Julich
Julich contre la montre

Les années qui suivront, Julich progressera non stop et finira par retrouver le top niveau, à l’eau claire. L’un des très rares exemples… si c’est vrai, bien sûr ! 2004, son année dorée, le verra remporter beaucoup de courses avec son O’Symetric, dont Paris-Nice, le critérium du Dauphiné et le Tour du Benelux ! A titre personnel, je me souviens parfaitement de son pédalier et ses immenses manivelles de 190 mm, découverts lors du prologue de Paris-Nice, à Sèvres. Incroyable !

En 2011, Julich devient entraîneur de la Sky (il la quittera après ses aveux de dopage entre 1996 et 1998). Dans les rangs de l’équipe anglaise
se trouve un certain Bradley Wiggins. Bobby lui conte comment ces plateaux magiques lui ont permis de progresser. Celui qui doit sûrement une partie de son titre de « Sir » aux O’Symetric plonge immédiatement ! Il gagnera dans la foulée le Tour 2012, alors que tout le monde comprend que son jeune équipier anglo-kenyan, illustre inconnu alors, est largement aussi fort que lui. Et tous deux roulent O’Symetric. Harmonic, à l’époque ! Ni l’un, ni l’autre ne les quitteront plus.

La réputation d’efficacité des plateaux O’Symetric est faite. Mais cela ne suffira pour transformer un succès technique et sportif indiscutable en succès commercial. Car, comme nous l’a confié Geoffroy Lequatre, aucun grand sponsor ne supportera de se faire damer le pion par un ingénieur français sorti de nulle part. C’est un enterrement de première classe qui se profilera pour O’Symetric. Heureusement, du côté des Anglo-Saxons, on a des résultats qui plaident en leur faveur ; et que ce soit Wiggins ou Froome, chacun refusera net de se passer de ces plateaux magiques !

O'Symetric Rayon

Trop précurseur ? Pas assez riche ? Arrogant ? Prétentieux ?

Durant vingt ans, Jean-Louis Talo aura droit à tous les coups bas possibles et imaginables. Le peloton international est chasse gardée. Quel que soit l’angle d’attaque. Quels que soient la qualité et le succès du produit. La guerre est perdue d’avance à ce niveau là. Mais une chose demeure. Le palmarès extravagant des O’Symetric au regard des moyens investis, et un rendement que personne ne peut scientifiquement contester. Quand on prend la peine de regarder la nature des chiffres que beaucoup de constructeurs avancent, et la qualité des études subies par O’Symetric, nul besoin d’être grand clerc pour comprendre que Jean-Louis Talo a trouvé un « truc ». Alors, ne serait-ce que pour la beauté du geste, ce truc est à votre portée. Ici, à l’Acheteur, on l’a compris depuis longtemps. Et vous ?

O'Symetric Proto plateau carbone
Plateau proto en carbone

INTERVIEW : La preuve par (Geoffroy Le)quatre !

O'Symetric Geoffroy Lequatre
Geoffroy Lequatre

Acheteur Cycliste : « Geoffroy, tu es l’un des précurseurs de l’O’Symetric dans le peloton. Que peux-tu en dire ? »
Geoffroy Lequatre : « J’ai effectivement roulé avec O’Symetric en 2008, 2009 et 2010, et je peux te dire que cela a été mes meilleures années en termes de performance. J’ai fini vainqueur du Tour d’Angleterre, de la première étape du circuit de la Sarthe, et j’ai obtenu ma sélection au championnat du monde et surtout des sensations comme jamais ! »
AC : « Techniquement, c’est donc différent ? »
GL : « Je ne pouvais plus me passer de ces plateaux qui étaient comme addictifs !
L’adaptation est rapide, mais il faut travailler la musculation des ischio-jambiers en conséquence, car comme la pédale revient plus facilement, tu utilises moins ces muscles ! L’efficacité se fait sentir en fin d’étape, ou même en fin de gros bloc d’entraînement ou en fin de grand Tour. Du coup, en fin de saison, la fatigue musculaire accumulée est amoindrie et vous êtes efficace là où les autres vont commencer à être usés ! »
AC : « Mais pourquoi as-tu arrêté de les utiliser, alors ? »
GL : « Si j’avais pu courir toute ma carrière avec, je l’aurais fait. Fâcheusement, les contrats des équipes en décident autrement. Certaines grosses équipes sont ouvertes au bien-être de leurs coureurs et laissent le choix à leur leader telles que Sky, avec Froome, qui utilise et impose ces plateaux. D’autres coureurs de la même équipe ont craqué sous la pression monétaire des grands groupes équipant l’équipe. Donc, si les grandes marques paient pour que les coureurs n’utilisent pas les plateaux, c’est que cela FONCTIONNE (c’est prouvé physiologiquement, Jean-Louis a passé sa vie à le démontrer ! Maintenant, il compte simplement ses victoires).
Enfin, les plus petites équipes ont peur que leurs coureurs utilisent ces plateaux car ils redoutent de perdre leur sponsors équipementiers, et donc préfèrent ne pas aller au conflit et interdisent à leur coureur de les utiliser, donc d’être plus performants ! Paradoxal, non ?
Les plateaux O’Symetric, ce n’est pas commercial. Ils existent depuis plus de vingt ans. Jean-Louis Talo est un pionnier de la biomécanique cycliste. Donc je le dis et le répète, je suis un O’Symetric « addict », et le monde ne tournant de toute façon plus rond, je préfère pédaler en O’Symetric ! »

Renseignements : www.osymetric.com/fr/

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