NEVI, L’AUTRE TITANE À L’ITALIENNE

Voilà donc le titane du mois. Nevi, si vous ne connaissez pas, est un artisan italien qui fait principalement du titane depuis plus de 25 ans. Sergio, ex-pro, et Consuelo Finazzi sont à la baguette. Et ça a souvent de la gueule. Voici le Stelvio, le polyvalent de la bande.

Nevi Stelvio

Pendant longtemps, rien n’a davantage ressemblé à un cadre titane qu’un autre cadre titane ! Tout le monde utilisait déjà du titane 3 AL/2,5 V, et c’était la géométrie et surtout la qualité du soudeur qui faisaient la différence. Et puis le titane a eu un gros regain d’intérêt dans les années 2000. Beaucoup s’y sont jetés corps et âme. Mais le marché du titane demeure restreint. On a vu disparaître Litespeed (ou presque), Dean, pendant que Passoni bataille dure pour continuer d’exister, mais l’esprit
semble s’être un peu perdu en chemin. Et la qualité des soudeurs, au passage. En France, à part l’incontournable Cyfac CMT, seuls Grade 9 et Le Vacon font perdurer le mythe. Aux USA, grand pays du titane, Moots et Seven brandissent toujours haut l’étendard titane.

Et donc il y a Nevi de l’autre côté des Alpes. Nous les avions rencontrés chez eux, il y a des années. Je me souviens encore de l’escalier en titane du magasin !

Nevi Stelvio Arriere

Le Stelvio est le polyvalent de la gamme. Ultra classique, tubes quasi ronds, poutre comprise, mais avec une nervure côté douille, le Stelvio ne prend aucun risque : il vise l’aisance et le confort dans les grandes largeurs. Le triangle arrière en est le plus bel exemple : difficile de faire plus simple, les bases sont de faibles sections, légèrement ovalisées, alors que les haubans sont, eux, dotés d’une section relativement importante mais sont parfaitement ronds ! Devant, le tube supérieur, légèrement
sloping quand même, est aussi très légèrement ovalisé alors que le tube de selle reçoit une tige à faible diamètre, 27,2 mm : tout pour le confort, donc.

Mais ce qui différencie Nevi des autres, c’est que la marque continue à souder dans un environnement clos, dans sa capsule étanche, ce qui permet aux soudures d’être totalement entourées d’argon, ce gaz sans lequel les soudures du titane ne font pas long feu. C’est d’ailleurs souvent à cause de cet environnement que les soudures de certains cadres titane cassent à répétition. Alors, ce n’est pas ce qu’il y a de plus pratique : intégrés à la chambre de soudure, deux manches à gants et une lucarne transparente permettent à Sergio de souder les tubes. Résultat, les soudures sont souvent semi-lissées pour proposer un design plus épuré. Mais ça tient ! A notre connaissance, contrairement à pas mal d’autres, un Nevi ne casse jamais.

Nevi Stelvio Douille

La boîte de pédalier est elle aussi classique, donc 68 mm de longueur, diamètre traditionnel et fileté BSC : c’est la quasi certitude de disposer d’une boîte assez souple pour donner de l’aisance à ce cadre, en toutes circonstances.

Comme souvent, la fourche est en carbone, pour alléger l’ensemble et le roulement du bas oversize. Du classique, désormais…

Naturellement, Nevi propose ses cadres sur-mesure, donc c’est «open bar» pour les tailles !

Nevi Stelvio Potence

Un équipement à l’italienne

Il faut reconnaître qu’avec un cadre italien en titane et sur-mesure, il est difficile, voire trivial de monter du Sram ou du Shimano ! Nous avons donc droit à un groupe Campagnolo Chorus, un bon choix qui permet d’alléger l’addition sans grever aucunement ni le style, ni le poids, ou si peu, ni même le fonctionnement. On prend !

Mention spéciale, évidemment, à la potence et à la tige de selle. Sachez, pour la petite histoire, que c’est Nevi qui a inventé la potence à capot à quatre vis ! D’ailleurs, cette potence est aussi belle que technique. Les vis inversées sont du plus bel effet, et apportent une sécurité supplémentaire. En revanche, côté vissage, l’accès est un peu plus complexe : grande clé BTR fortement recommandée…

Nevi Stelvio Cassette derailleur arriere

Quant à la tige, difficile de faire plus simple et plus épurée : le chariot est carrément soudé sur la tige, puis poli. Ca pourrait être un peu plus fin, mais la patte de l’artisan vous saute au visage !

Côté guidon, c’est moins glamour, mais propre : un FSA Energy Compact. Ça jure pas mal, mais ça fait le job. Il faut dire aussi que ce Stelvio est un modèle de test, ce qui explique certains points discutables, à commencer par les roues ! PMP est une marque quasi inexistante en France. Réputée pour ses tiges de selle et ses pédaliers, elle fait aussi des moyeux assez solides et artisanaux. Choisir des roues aluminium sur ce genre de vélo, c’est jouer, encore une fois, la tradition à bloc, mais c’est aussi prendre un gros risque sur le rendement de la bête ! Et puis les jantes ne font pas rêver. Nous n’en sommes pas fans… Et quitte à mettre des roues aluminium à pneus (beurk !), il y a d’autres montages à imaginer. On vous laisse voir, mais on imagine plus des Fulcrum ou des Campagnolo. Et pour faire plus fin, niveau rayonnage, des DT Swiss de 24, par exemple…

Quoi qu’il en soit, ici tout n’est qu’exemple, puisque le montage à la carte est l’évidence chez Nevi.

Nevi Stelvio Boitier pedalier

Sur la route

Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas ! Jugez plutôt. Premier tour-test avec le Nevi et voilà qu’après un départ « douteux », physiquement parlant, je m’écroule à moitié dans la côte de la Roque : fringale ! Je finirai par m’empiffrer de barres chocolatées, Coca et autres bonbons sucrés pour rentrer.

Donc ce matin, je repars pour le tour-test, mon compteur merdouille un peu, comme d’habitude, je vérifie la pile du capteur de cadence, ça se règle et je vérifie : tout va bien… Jusqu’à mon arrivée après le parcours : ça n’a pas fonctionné ! Bon, là, j’ai mon compte ! Alors le Nevi Stelvio, on va se le faire aux sensations, si cela ne vous gène pas trop !

Nevi Stelvio Pedalier

D’abord, j’avoue que j’ai regardé les roues PMP aluminium à pneus avec une certaine méfiance, pour ne pas dire plus. Je pars donc avec un sentiment déjà mitigé. Difficile d’y échapper. Et puis le demi-tour version fringale n’arrange pas mon feeling pour ce deuxième essai.

Mais je me remets mentalement à zéro et roule. Ça va indéniablement mieux ! je teste dès le départ ces roues pour tenter d’identifier leur comportement et pouvoir faire la différence avec celui du vélo complet. Un coup de danseuse, un coup de gros braquet : ça semble aller, mais je les vois mal se sortir de la Roque avec maestria.

Nevi Stelvio Poste de pilotage

Je traverse le village et me présente au pied de la Roque-sur-Pernes : très bien jusqu’à la montée du cimetière, comme souvent, et les 11% se rappellent immédiatement à mon bon souvenir. Naturellement, le Stelvio se tasse et ralentit. Les cuisses commencent à chauffer, et je me dis que ça ne va pas être la fête… mais comme quelques rares machines, très souvent de haut de gamme, on arrive à un palier qui ne bouge plus : dans
les 10% de moyenne qui suivent, le Nevi se tient et accepte sans rechigner le dénivelé. C’est bien mieux que le superbe Legend Il Re Disc titane du dernier numéro : je vous confirme que l’association titane et freins à disques est à prendre avec des pincettes, si vous aimez la montagne.

Nevi Stelvio Fourche

Alors c’est bien un titane, et il vaut toujours mieux mouliner un peu plus qu’avec un carbone, mais je monterai bien mieux que je ne m’attendais. J’ai aussi en tête le RS2 de CMT et, là encore, le Nevi s’en sort bien mieux. Mais attention : les gros braquets, ce n’est pas son truc en grosses côtes, mais pas non plus jusqu’à 6% : la seconde partie de la cote de la Roque me le prouvera, puisque je repasserai sur le petit plateau très vite,
après avoir tenté de mettre le 50 dents dans cette partie bien plus roulante…

La descente se passe très bien, rien à dire. C’est précis et confortable, ce que l’on attend d’un titane. Je me surprends même à sentir une amélioration en augmentant encore la cadence, au-delà de 50 km/h. Comme si le Stelvio et ses roues progressaient encore avec la vitesse.

Nevi Stelvio Tige de selle

Mais la belle surprise est pour maintenant : un titane, sur le plat, c’est facile, plaisant, mais cela ne va généralement pas très vite. Or, dans le grand faux-plat de retour, qui culmine à 5%, le Stelvio se révèle !!! Sur le 50×26, je passerai très joliment ce faux-plat, et sans souffrir ! Le constat est donc assez clair : jusqu’à 5-6%, le Stelvio et ses roues PMP proposent un certain dynamisme et du plaisir. Au-delà, le vélo se pose et pas la peine de s’exciter. Passés les 10%, on mouline, on fait aller, et on attend que cela se calme. Un vrai titane, quoi !

Et puis, quand même, le raidillon final. Nouvelle bonne surprise, toujours toutes proportions gardées, le Stelvio l’avalera grâce à sa souplesse, juste comme il faut.

Il m’aura fait beaucoup penser à mon premier CMT et même, bien plus loin, à mon Dean El Diente : des vélos agréables, économes (en énergie, pas en euros !) et fiables.

Indéniablement, le Stelvio est un agréable vélo. Il passe vraiment partout, ne vous scotche pas quand cela devient (très) dur, et offre de belles sensations quand le terrain s’y prête.

Nevi Stelvio Finition cadre

Un pur titane

Cela faisait longtemps ! Longtemps que nous n’avions pas roulé sur un titane « à l’ancienne ». Comprenez un titane qui ne singe pas le carbone, et qui se comporte en tant que tel. Il n’a certes pas le rendement d’un bon carbone, ni le pur confort d’un acier de qualité. En revanche, il parvient à maintenir une belle aisance, même avec des roues aluminium à pneus, ce qui est un petit exploit en soi. Mais surtout, surtout, voilà un vélo qui
sera sur-mesure, qui sera VOTRE vélo, et qui sera le fruit d’un artisan, fabriqué en Italie et fiable. Par les temps qui courent, voilà qui fait du Stelvio un vélo hors normes…

Nevi Stelvio Tableau

Renseignements : www.nevi.it

 

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